Archives de
Tag: fin mars début avril

[Chronique] Albédo – Sébastien Fritsch

[Chronique] Albédo – Sébastien Fritsch

albédo

  • Éditeur : Éditions fin mars début avril (2016)
  • Pages : 310
  • Genre : Drame
  • Prix : 18€
  • Acheter Albédo

L’amitié est ce qui reste quand on a tout perdu. Alors Nil n’hésite pas : dès que Mock le contacte, il accepte de le suivre. Même s’ils ne se sont pas dit un mot depuis quinze ans. Même si c’est pour convoyer une urne funéraire. Et même si la destination n’est autre que Ti-Gwern, cette grande maison où, quelque vingt ans plus tôt, ils étaient une poignée à partager leur jeunesse.
Nil sait pourtant qu’on n’efface pas le temps en remontant une vieille route : les rires et la musique, les vins parfumés, les regards, les désirs qui animaient tous leurs séjours dans ce lieu hors du monde, sont désormais bien loin… sans même parler de Maud.
Alors, est-ce l’amitié ou la nostalgie qui le motive à faire le voyage ? Ou devinerait-il, sans vraiment se l’avouer, que rien n’est vraiment fini tant qu’on ne s’y résigne pas ?

Merci à l’auteur, Sébastien Fritsch, pour cette lecture !

Mon avis

Cela fait quinze ans que Nil n’avait pas eu de nouvelle de Mock, son ami. Mais quand celui-ci l’appelle pour lui demander de le soutenir lors de la dispersion des cendres de Richard en Bretagne, Nil ne se pose pas de question et accepte. Une fois à Ti-Gwern, Mock disparaît sans laisser de trace. Après s’être échiné à rechercher son ami – sans succès – , Nil rentre chez lui, bien décidé à oublier ce week-end. Mais ses résolutions vont vite tomber à l’eau quand Maud, la sœur de Mock, l’appelle pour savoir où est passé son frère, qui n’a toujours pas redonné signe de vie…

Albédo, c’est la dissection d’une amitié, de son début jusqu’au moment présent. Comment a commencé cette relation ? Comment se sont-ils connus, en sont venus à passer quasi toutes leurs vacances ensemble en Bretagne ? Et surtout quelle est la raison de la séparation de ce groupe d’amis disparates… Bref, autant de questions dont les réponses se trouvent dans ces pages.

Mais pour moi, ce roman, c’est lâcher sa vie d’enfant/adolescent, pour enfin passer à celle d’adulte et être enfin acteur de sa propre vie. Car bien que Nil soit un adulte, on sent bien qu’il reste bloqué dans le passé et ne prend pas de risque dans sa vie, au point d’en perdre sa femme qui voulait bien plus que ça. Un Nil qui refuse de voir la vérité en face, assommé par sa routine, ne cherchant pas plus loin que le bout de son nez. Ce retour à Ti-Gwern est comme un ultime adieu à cet ancien-lui, pour embrasser de nombreux changements dans sa vie.

Côté écriture, je me suis retrouvée déboussolée plus d’une fois, l’auteur partant dans tous les sens à certains moments. Et à trop vouloir ménager le suspens, Sébastien Fritsch laisse s’installer quelques longueurs. Ce sont pour moi les seuls points gênants de cette lecture, tant j’ai été prise à côté dans ce retour à Ti-Gwern et les souvenirs de Nil.

Concernant la fin, nous ne savons pas vraiment qui est donc la personne – l’élément perturbateur – , qui à cause de son acte, a fait chasser tous les vacanciers de la demeure bretonne. Mais qu’un certain personnage connaisse exactement la forme de la cicatrice que l’élément perturbateur a reçu me laisse perplexe et songeuse…

En bref, Albédo est un roman sur l’amitié qui nous rend nostalgique avec ses nombreux flashbacks. Une bonne lecture, si on ne regarde pas trop du côté de ces moments où l’on est mené dans tous les sens sans vraiment en comprendre le but.

[Chronique] Derrière toute chose exquise – Sébastien Fritsch

[Chronique] Derrière toute chose exquise – Sébastien Fritsch

derrière toute chose exquise


Depuis près de vingt ans, Jonas Burkel photographie toujours la même femme ; seul le prénom change. Mais plus que les brunes longilignes au regard perdu, il semble que son vrai grand amour soit ses habitudes : ses disques de piano jazz, ses errances dans Paris… et ces corps féminins dociles et invariables.

La fille qu’il découvre dans un train de banlieue, accrochée à un roman d’Oscar Wilde, semble la candidate idéale pour prolonger la série : il oublie immédiatement son précédent modèle, imagine déjà sa nouvelle conquête devant son objectif, dans des rues sombres, sous la pluie, sous ses draps…

L’idée qu’une femme puisse refuser son petit jeu sentimental ne lui traverse même pas l’esprit. Mais comment pourrait-il deviner que, tout comme lui, la lectrice du train n’accepte aucune règle sinon celles qu’elle invente ? Et que tout ceux qui l’approchent doivent s’y plier ; jusqu’à y jouer leur vie.

Mon avis

Nous sommes le 15 février 1993. Jonas Burkel, quarantenaire et photographe, rentre d’un de ses nombreux voyages à Meaux pour son chez lui, à Paris. A peine monté dans le train qu’il la remarque. Grande, brune, elle ressemble à ses trente exs, trente femmes qui se ressemble toutes. Le nez plongé dans Le portrait de Dorian Gray, elle se laisse aborder par notre photographe qui est déjà sous le charme, qui lui laisse sa carte au cas où si elle aurait voulu poser pour lui. Une fois chez lui, elle l’appelle n’ayant nulle part où dormir, alors Jonas l’accueille chez lui, le temps d’une nuit. Sa vie s’arrête quand la jeune femme part de chez lui, sans jamais le recontacter… Un véritable jeu du chat et de la souris se lance, complètement romanesque, poétique et cruel.

Quand on se lance dans cette lecture, il est impossible de s’arrêter. On est pris dans la spirale des sentiments qu’éprouve Jonas, mais un Jonas malade, qui aurait écrit toute cette mise en scène, ou un Jonas réellement amoureux, pris dans l’engrenage infernal de la jeune fille au livre ? L’histoire est parsemée de longues descriptions poétisées, imagées, qui empiètent par moment sur l’histoire, mais qui ne nous dérangent pas plus que ça. C’est fluide, court, incisif, on voit où l’auteur veut en venir sans forcément deviner de quoi retourne le dénouement final.

J’ai beaucoup aimé comment les personnages étaient décrit, on ressent bien leur état d’esprit au moment où on les rencontre. Que ce soit Margot, la fille qui au bout de quatre ans n’arrive pas à se faire à l’idée que Jonas l’ai quittée pour une autre -comme d’habitude-, Kelly, sa seule amie, la seule femme qui le comprend, ou Emmanuelle, que j’ai trouvé un peu trop naïve, voir même Jonas en lui-même, ce photographe de quarante ans qui découvre enfin l’amour -le vrai, l’unique-, et qui n’arrive plus à faire quoi que ce soit de ses journées depuis que la jeune liseuse est partie vivre à l’hôtel, en dehors d’écouter Angel Eyes de Oscar Peterson, fumer des lucky en buvant un verre de whisky, tout en regardant ce que font ses voisins d’en face par la fenêtre, tout en repensant à elle.

En bref, un bon petit roman noir, teinté d’amour, de poésie et de drames, qui se lit vite. Un très bon moment passer en compagnie de Jonas avec qu’une seule interrogation : une suite verra-t-elle le jour ? En tout cas, je vais m’intéresser de plus près des autres ouvrages de l’auteur, qui me semble prometteur. Je tenais aussi à remercier le forum Have a Break, Have a Book et l’auteur, Sébastien Fritsch pour ce partenariat 🙂